La ville et le château de Richelieu.



Au XIIe siècle, les seigneurs de Mosson possédaient, tout près du bourg de Braye sous Faye, une résidence fortifiée, qui est en ruine de nos jours. En fin du XIIe siècle, Hugues de Mosson qui vient d'obtenir une propriété en bordure du Mable, Richeloc, décide d'y faire bâtir un château et une chapelle. C'est le tout premier château de Richelieu. Au début du XVe siècle, le domaine quitte la famille des Mosson pour la famille Clérembault, par le mariage de Jean de Clérembault avec Gillette de Mosson.
C'est la fille de Jean de Clérembault, Perrine, qui va conduire la famille du Plessis à Richelieu. En 1420, Perrine de Clérembault épouse Geoffroy du Plessis, seigneur de la Vervolière. Perrine suit son époux au château de la Vervolière, tandis que son frère, Louis, est maintenant responsable du domaine de Richelieu. Le premier du Plessis, seigneur de Richelieu sera François, le fils de Geoffroy et de Perrine. Les du Plessis vont ainsi se succéder jusqu'à François IV, le père du grand Cardinal.

La mort de François IV du Plessis, laisse derrière elle de dures difficultés pour la famille. En effet les dettes étaient très nombreuses, cette situation est d'autant plus sérieuse pour Henri, le fils aîné de la Famille, qui est d'un esprit difficile, bouillonnant et dépensier. Mais Armand est à une période charnière de son existence et les soucis financiers de son frère ne lui paraissent pas d'une extrême gravité en comparaison de ceux que connaît la France d'alors, troublée et divisée. Armand repart à Paris appelé par les devoirs de sa charge de secrétaire d'Etat.
Soudainement, les choses tournent mal, Concini est assassiné, Louis XIII et son favori de Luynes, reprennent le pouvoir accaparé par la reine mère, Richelieu se retire des affaires à Blois avec Marie de Médicis. Mais de Luynes accepte mal les allés et venues qui se font autour de l'évêque de Luçon. Richelieu et son frère Henri sont exilés à Avignon. C'est en octobre 1618 que la châtelaine de Richelieu a mis au monde l'enfant d'Henri, François-Loïs du Plessis, hélas la mère n'a survécu qu'un jour à l'accouchement difficile, ensuite quelques semaines plus tard, c'était au tour du nourrisson de mourir. Henri n'obtient même pas l'autorisation d'assister aux sépultures.
L'année 1619 est le retour en grâces de l'évêque de Luçon, ce dernier est rappelé à la cour pour réconcilier Louis XIII à sa mère. Par la même occasion, Henri retrouve les faveurs royales et il est nommé gouverneur d'Angers. Malheureusement ce poste est aussi l'ambition du marquis de Thémines, capitaine des gardes de la reine, il provoqua donc le seigneur de Richelieu en duel

"on tire le fer et, après trois ou quatre estocades, le marquis recule et se couvre derrière son cheval. Ainsi abrité, il tire un dernier coup qui atteint Henri au cœur..."(Bosseboeuf)

Henri moura peu de temps après, et ira rejoindre le reste de la famille dans le caveau de Braye. La douleur d'Armand est vive et on ne peut s'empêcher de penser à l'attitude sévère qu'il adoptera bientôt et qui le conduira à faire interdire les duels sur tout le territoire.

Après la mort de son frère Henri, qui était l'héritier direct du château, Richelieu veut absolument l'acquérir. Il montre un très gros attachement à ce château où sont nés tous ses ancêtres et lui-même. Il veut ce château à tout prix. Le règlement des affaires a été long et difficile mais finalement Armand eu le château et la seigneurie pour 79000 livres au cours d'une vente aux enchères. En mars 1621, Messire Armand Jean du Plessis de Richelieu, évêque de Luçon, prenait possession de son domaine.

Et les années passent, Richelieu est à son apogée, il est Cardinal et chef du Conseil du Roi. Au cours d'une visite au manoir ancestral, il décide d'en faire une demeure digne de sa nouvelle renommée, un palais qui pourra recevoir le Roi.

L'année 1625 semble marquer le début des travaux à Richelieu, longue période d'activités qui ne cesseront pas, jusqu'à la mort du Cardinal. Il a Jacques Lemercier, architecte du Roi et du Cardinalconfié à Jacques Lemercier la charge de lui réaliser ce somptueux château, avec quand même une condition ; conserver l'aile droite de l'ancien château, celle qui contenait la chambre où Armand a vu le jour. Après avoir longuement étudié sur place Lemercier revient Paris où il présente les plans, qu'il vient de réaliser, à son client. Richelieu donne son accord et les travaux commencent dès le lendemain.
Richelieu choisi le sieur de la Marbelière, Jean Rogier, pour suivre les travaux et les payer. Fin du mois de juin 1626, le Cardinal vient voir, lui-même, sur place où en sont les travaux.
les travaux ont tout juste commencés, que le Cardinal se préoccupe déjà de la décoration, il écrit à Bouthillier de faire transporter à Richelieu un buste de Louis XIII et de la reine mère.
Dans les années 1627 et celles qui suivent, l'activité du Cardinal autour de son domaine se manifeste par des acquisitions qui prouvent les projets grandioses qu'il envisage pour sa ville. En voici quelques exemples

Bien sûr les acquisitions continuent, le Cardinal désire faire disparaître les témoignages d'une puissance autre que la sienne. Par lettres patentes est prononcé l'union des seigneuries, justices, châteaux, villes et villages de Mirebeau l'Ile Bouchard, Faye, Ceaux. Six ans plus tard seront incorporés Champigny, La Rajace, Crissay, Cravant, ...

Pendant ce temps les travaux ont bien avancés. Il apparaît de plus en plus que l’œuvre de Lemercier sera une réussite. Il ne manquera rien à ce Duché-Pairie, il aura l'étendue, les revenus, un splendide château... Le Cardinal s'aperçoit alors que ses réalisations manquent de vie, il n'y a aucune activité, ni économique, ni administrative au siège de son Duché. Il lui faut des gens, de l'animation, de la vie, en bref UNE VILLE.
Louis XIII ne refusa pas cette faveur à son grand et fidèle serviteur, en 1631, alors que le château est à peine sorti de terre, le Roi, par lettres patentes, autorise le Cardinal à construire un bourg près de son château.
Dès lors le site de Richelieu va se transformer en véritable fourmilière couvrant des hectares où plus de 2000 ouvriers vont évoluer.
La construction du château grandit, en septembre 1631, Richelieu répond à une lettre de Sourdis, archevêque de Bordeaux et son homme de confiance, qui se trouve sur place : " Je suis bien aise de voir que les bastiments de Richelieu s'avancent ".
En 1632, Richelieu vient sur place se rendre compte de l'état d'avancement des travaux. L'année suivante, une épidémie de peste sème la panique sur le chantier, la construction risque de s'arrêter, mais Richelieu dépêche Sourdis de remettre de l'ordre. Cette année fut importante aussi dans la construction du château, l'ancien corps de celui ci est terminé.
Les travaux avance bien, malheureusement Richelieu, que l'on a vu au début des travaux, ne revient plus trop occupé par les problèmes du pays aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur (la guerre de Trente ans notamment), il reporte toujours son voyage à Richelieu. En 1640, le voyage prévu est annulé.
En 1642, alors que le Cardinal rentre de Perpignan, tout le monde pense enfin qu'il va pouvoir s'y arrêter mais les médecins en décident autrement. Le 4 décembre 1642, le Grand Cardinal meurt sans avoir vu sa merveille.
Le château cependant a déjà été de nombreuses fois ; Monsieur le frère du Roi, Gaston d'Orléans, la nièce de Richelieu, Madame de Combat, Léon Godefroy, Mademoiselle de Montpensier, Jean de La Fontaine, Louis XIV et bien d'autres encore.

La succession du château

Sa mort, en 1642, ne lui laissa pas l'occasion de profiter des beautés de son château à peu près terminé, qui, par les magnifiques oeuvres d'art qu'il contenait, était l'un des plus beaux d'Europe.

L'arrière petit-neveu du Cardinal, Armand-Emmanuel, émigra lors de la Révolution, ses biens furent confisqués et les oeuvres d'art que contenait le château furent vendues ou attribuées à des musées.
En 1805, le domaine, fort endommagé, fut racheté par un marchand de biens, Alexandre Bontron, qui démolit le château pour en vendre les matériaux. Seuls le Dôme, l'Orangerie, les Caves et l'entrée monumentale échappèrent au massacre.
En 1852, un propriétaire transitoire, M. Laurence, avait fait construire une grande demeure dite "le petit château", que l'on peut voir en face du Dôme, dans le fond du parc.
En 1877, le domaine fut reconstitué par Monsieur Michel Heine, banquier à Paris, dont la fille avait épousé le descendant de Richelieu, Marie Odet Jean Armand de Jumilhac, duc de Richelieu.
En 1930, Armand, marquis de Jumilhac, duc de Richelieu, n'ayant pas d'héritier, légua le domaine à l'Université de Paris, en souvenir du Cardinal, Proviseur et Rénovateur de la Sorbonne.
Du magnifique château édifié par le Cardinal de Richelieu, subsistent seulement un pavillon des communs : le Dôme, l'Orangerie, les Caves et l'hémicycle d'entrée avec ses pavillons. Une roseraie occupe l'emplacement du corps principal du château.

Quelques photos

le Dôme la roseraie porte de Chinon
Porte de Chinon Porte de Chatellerault la grande rue
La ville de Richelieu depuis le ciel, admirez cette géométrie!

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© Sébastien DOUTRELOUP